

Les accords-cadres à bons de commande sont un outil clé dans la gestion des marchés publics. Leur flexibilité et leur capacité à répondre à des besoins récurrents en font une solution privilégiée. Cependant, les nouvelles dispositions introduites par le décret n°2024-1251 viennent transformer leur mise en œuvre, notamment pour les accords-cadres multi-attributaires. Décryptons ensemble ces évolutions.
❓Qu’est-ce qu’un accord-cadre a bons de commande ?
📢 Définition et principes
Selon les dispositions de l’article L. 2125-1 du Code de la commande publique, un accord-cadre est un contrat « qui permet de présélectionner un ou plusieurs opérateurs économiques en vue de conclure un contrat établissant tout ou partie des règles relatives aux commandes à passer au cours d’une période donnée ».
Autrement dit, un acheteur public ou privé prévoyant d’acheter des biens ou services dans une période donnée conclut à l’avance, avec la ou les entreprises pouvant fournir ces biens ou services, un contrat par lequel il s’engage à passer commande auprès d’elles, au fur et à mesure de ses besoins. Les entreprises quant à elles s’engagent en retour à fournir, le moment venu, les biens ou services conformément aux dispositions de l’accord-cadre.
On distingue aujourd’hui deux types d’accords-cadres : l’accord-cadre avec émission de bons de commande et l’accord-cadre avec conclusion de marchés subséquents.
L’accord-cadre avec émission de bons de commande est le plus courant et le plus simple. Il est fréquemment utilisé pour des achats récurrents comme des fournitures de bureau, des prestations de traiteur, des prestations de nettoyage…

Les accords-cadres peuvent être mono-attributaires (un seul titulaire) ou multi-attributaires (plusieurs titulaires). Dans ce dernier cas, ils offrent une flexibilité accrue en permettant de répartir les prestations entre plusieurs fournisseurs.
🕒 Quand utiliser un accord cadre a bons de commande ?
Un accord cadre à bons de commande est particulièrement adapté pour :
- Des besoins courants et standardisés.
- Mutualiser des achats pour des économies d’échelle.
- Sécuriser ses approvisionnements.
- Adapter et fractionner dans le temps ses besoins.
Astuce : Si vos besoins sont spécifiques ou hautement personnalisés, un accord-cadre à marchés subséquents sera plus adapté.
📋 Accords-cadres A BONS DE COMMANDE multi-attributaires : avant le décret n°2024-1251
Dans les accords-cadres multi-attributaires, les bons de commande étaient historiquement attribués selon des méthodes prédéfinies, sans mise en concurrence entre les titulaires ni négociation. Parmi ces méthodes, on retrouve :
- Le système en cascade : l’attribution se fait dans un ordre hiérarchique entre les titulaires.
- Le tour de rôle : chaque titulaire reçoit successivement un bon de commande.
Bien que pratiques, ces systèmes limitaient parfois la compétitivité et la souplesse dans l’exécution des prestations.
💼 Ce que change le décret n°2024-1251
Entré en vigueur le 30 décembre 2024, ce décret introduit une nouveauté majeure : la possibilité de mettre en concurrence les titulaires sur certains bons de commande. Ces bons de commande deviennent alors équivalents à des marchés subséquents.
Conditions de mise en concurrence
Pour appliquer cette nouveauté, trois conditions doivent être respectées :
1️⃣ Les documents de consultation doivent mentionner explicitement cette possibilité de mise en concurrence.
2️⃣ Les circonstances justifiant ce recours doivent être clairement définies dans le cadre de l’accord-cadre.
3️⃣ Les éléments de l’accord-cadre concernés par cette procédure doivent être précisés (prestations spécifiques, volumes, etc.).
🚀 Quels critères pour la mise en concurrence ?
Les titulaires ne pouvant pas proposer d’offres complémentaires, les critères d’analyse des bons de commande mis en concurrence ne peuvent pas porter sur :
- Les prix.
- La qualité technique.
Les critères devront donc se concentrer sur les conditions d’exécution des prestations, telles que :
- Les délais d’exécution.
- Les modalités de livraison.
- Les quantités spécifiques.
- Les taux de remise.
Cette approche garantit une mise en concurrence équitable tout en respectant les principes de transparence et d’égalité d’accès.
🌟 Les impacts et précautions pour les acheteurs publics
📈 Opportunités
- Une meilleure flexibilité dans l’attribution des prestations.
- Une adaptation accrue aux besoins spécifiques des projets.
- Une stimulation de la compétitivité entre les titulaires.
🔧 Précautions à prendre
- Veiller à une application stricte des critères d’analyse pour respecter la réglementation.
- Soigner la rédaction des documents de consultation pour éviter les ambiguïtés.
- Prévoir des modalités claires de mise en concurrence pour assurer la transparence.
📝 Complexité ou simplification ? Une réflexion sur l’évolution des accords-cadres
Le décret n°2024-1251 constitue une avancée majeure pour les accords-cadres multi-attributaires. Mais cette évolution soulève une question clé : est-ce une réelle simplification ou une complexité supplémentaire pour les acheteurs publics ?
D’un côté, cette mesure offre une flexibilité accrue. La possibilité de mettre en concurrence les titulaires sur certains bons de commande permet une adaptation plus fine aux besoins spécifiques des acheteurs, tout en stimulant une forme de compétitivité entre les titulaires. Cela répond à un double objectif :
- Garantir une utilisation optimale des fonds publics.
- Promouvoir une meilleure exécution des prestations en fonction des contraintes du marché.
D’un autre côté, cette évolution impose une maîtrise renforcée des processus. Les acheteurs doivent désormais anticiper et expliciter dans leurs documents de consultation les conditions de mise en concurrence et les éléments concernés. Cette formalisation accrue pourrait alourdir la préparation des marchés et augmenter les risques d’interprétations litigieuses.
Pourquoi cette évolution ?
L’origine de cette réforme s’inscrit dans une double volonté :
- Moderniser la commande publique en alignant les pratiques sur les besoins actuels des acheteurs et les réalités des marchés.
- Favoriser une meilleure performance des accords-cadres en introduisant des mécanismes de concurrence ciblés et plus justes.
Ces ajustements répondent aussi aux retours des praticiens, qui soulignaient les limites des systèmes traditionnels, comme le cascade ou le tour de rôle, peu adaptés à des marchés complexes ou évolutifs.
Un équilibre à trouver
Si cette évolution offre des opportunités indéniables, elle impose aux acheteurs une réflexion stratégique approfondie. Les nouvelles marges de manœuvre offertes par le décret doivent être utilisées avec discernement pour éviter de tomber dans des procédures trop complexes ou inadaptées.
Le défi ? Trouver l’équilibre entre la rigueur nécessaire pour respecter la réglementation et la souplesse permettant d’optimiser l’exécution des marchés publics.
Cette réforme, encore jeune, nécessitera des ajustements pratiques et des retours d’expérience pour révéler pleinement son potentiel. Elle ouvre toutefois la voie à une commande publique plus agile et innovante, à condition de bien comprendre et maîtriser les nouvelles règles du jeu.
➡️Pour aller plus loin !
Téléchargez le texte intégral du décret sur Legifrance ou consultez les ressources de la DAJ.
Consultez notre blog juridique des marchés publics et retouvez en détails toutes nos dernières actualités !
